Ce sympathique opérateur qui accompagne ces pages techniques se contente de regarder la scène filmée… Comment a-t-il controlé son image ?
On observera qu’il doit tenir son appareil avec l’autre main (la première actionne la manivelle !) et qu’il ne fait pas “corps” avec. L’histoire de la caméra montre une
recherche pour faire “fusionner” l’opérateur (et spécialement son oeil) avec la machine.
Aujourd’hui, avec les appareils numériques légers (caméscopes, smartphones…), ce n’est pas l’oeil qui “fait” l’image mais la main, tendue, éloignée du
corps…
La visée idéale est celle où l’oeil
de l’opérateur est parfaitement
à la place de la fenêtre d’impression : l’opérateur fait ainsi corps avec son
image. L’oeil est dans le
prolongement de l’axe optique. Le problème semble anodin, mais est resté longtemps sans solution
totalement satisfaisante…
Avec les premières caméras,
il n’y avait pas de visée
proprement dite. On regardait à travers la fenêtre d’impression, on chargeait le film, on fermait la
caméra… Et l'on faisait comme notre
opérateur ci-dessus !
Rapidement, la
visée s’est faite à travers le
film : ce dernier faisant office
de verre dépoli sur lequel l’image se forme. Un prisme redresseur permettait de
voir l’image “dans le bon
sens” et seul un oeil bien exercé
pouvait suivre la scène. Par la suite, les émulsions devenant plus denses, il était quasiment impossible de juger un cadre.
Pour pallier ces difficultés, très rapidement des viseurs ont été montés soit sur le dessus de
l’appareil, soit sur le côté. Si ces solutions sont valables pour des sujets lointains,
le cadre perd en précision dès que le sujet se rapproche : on parle de défaut de parallaxe. On peut facilement le constater soi-même en observant
un objet rapproché et en fermant alternativement chaque oeil : l’objet est modifié en perspective.
Pour compenser ces défauts de parallaxe, les constructeurs ont imaginé des systèmes de corrections, parfois assez
complexes.
La visée sur le film:
Comme esquissé ci-dessus,
la visée à travers le film permet de délimiter très précisément le champ de la prise de vues et de vérifier la mise au point. Ce type de visée est réalisé grâce à une lunette grossissante. Celle-ci
peut être disposée directement derrière le presseur de couloir de prise de vues (illustration ci-dessous), si aucun mécanisme
ne s’y
oppose ; dans ce cas contraire, le
presseur porte un prisme de renvoi. Cette visée n’est possible que si le film possède un minimum de
translucidité. L’adoption de couches anti-halo a rendu cette visée quasi impossible. La visée de
type “réflexe”
est vite devenue
incontournable.
La visée sur la Parvo Debrie (extrait de la brochure Debrie).
Les viseurs directs:
Les
viseurs les plus simples sont des viseurs “collimateur” à
cadre iconométrique : simple rectangle en tôle ou
fil d’acier associé à un oeilleton.
L’oeilleton de visée peut être couplé à une lentille qui joue alors le rôle de
loupe (viseur type lunette de Galilée). Ces viseurs sont généralement disposés sur un côté
ou au-dessus de l’appareil.
La visée réflexe:
Pour pallier le défaut de la visée à travers le film (cf. supra), il a été imaginé des
dispositifs permettant de viser directement à travers la fenêtre de prise de vues. Mais cette visée ne pouvait se faire que pendant les arrêts de la caméra. Des systèmes mécaniques substituaient à la
pellicule une lunette et son verre dépoli : c’est le cas de la caméra Parvo
L. La caméra Mitchell NC fait glisser son bloc
mécanique “image” latéralement : lors de la prise de vues réelle, on cadre avec un viseur
latéral.
La seule solution qui donne une visée précise est celle qui consiste à “prélever”
une
partie du faisceau lumineux formé par l’objectif et destiné
à impressionner la pellicule. Pendant le temps
d’obturation (c’est-à-dire au moment où la pellicule est en mouvement dans le couloir et ne reçoit donc pas de lumière) le faisceau
lumineux est dirigé vers la visée, donc l’oeil
de l’opérateur. Mécaniquement, il a suffi de placer un élément réfléchissant
sur l’obturateur et un système de renvois optiques (prismes, miroirs, etc.). On trouve ce
système sur le Caméflex.
L’intermittence ne semble pas une gêne
et
permet même de se rendre compte de problèmes périodiques comme l’effet stroboscopique par
exemple.
De plus, un miroir réfléchissant sur l’obturateur n’interdit nullement une seconde pale
mobile.
D’un point de vue ergonomique, on notera que généralement,
l’axe optique de la visée réflexe n’est pas dans le prolongement de l’axe optique, mais dans un axe parallèle, sur le côté de la
caméra.
Autres visées réflexes:
Ce sont des systèmes
exclusivement optiques qui consistent à prélever une faible partie du faisceau lumineux avant que celui-ci
n’atteigne la pellicule:
- à l’intérieur même
de l’objectif par un jeu de
prismes réfléchissant. Dans ce cas ce n’est pas la caméra qui est réflexe,
mais l’objectif : une caméra non réflexe peut ainsi devenir réflexe grâce à ces
objectifs !
-
à l’extérieur
de l’objectif, c’est-à-dire entre la lentille postérieure de ce dernier
et l’obturateur. Ici, une
surface semi-réfléchissante
prélève une partie de la
lumière pour la visée. Dans ce cas, c’est la caméra qui est réflexe
et l’opérateur peut employer
tous les objectifs disponibles pour le type d’appareil concerné. C’est le cas de la
caméra Bolex Paillard
H.
Remarques :
– la visée réflexe à travers l’objectif prélève de la lumière destinée à la pellicule : il faut que cette proportion soit la plus faible possible ;
– l’image perçue par l’opérateur grâce à la visée réflexe est une image dont la perspective est identique à celle impressionnée et est indépendante des longueurs focales utilisées ;
– il n’y a pas de problème de parallaxe ;
– toutefois, un viseur “clair” de côté permet plus de facilités pour la réalisation de mouvements d’appareil avec plateforme à manivelles…
et :
La visée électronique:
– permet l’utilisation des plateformes à manivelles du fait de la grande taille
de l’image et donne
de l’aisance
à l’opérateur…
et une image parfaitement
identique (et de meilleure qualité que le viseur clair de côté) à celle impressionnée sur la
pellicule !
– elle permet aussi la distribution
d’image sur des écrans de contrôle pour le
réalisateur, d’autres techniciens,
etc.
3 types de visées électroniques:
1 – une image reprise
directement sur un tube électronique ;
2 – un viseur électronique
captant optiquement l’image d’une visée réflexe par une
micro-surface ou par prisme semi-réfléchissant intégré à un objectif à foyer variable (bien adapté aux caméras non réflexes par construction);
3 – système
alternatif : soit la visée réflexe
classique par obturateur tournant, soit la visée électronique à l’arrêt pendant l’enregistrement de la scène (au choix du
caméraman).